Contes et Légendes Médiéval


Mélusine

 Femme ravissante jusqu'au nombril avec une queue de serpent dont elle déploie magnifiquement les écailles et sur son dos s'attachent de vastes ailes de démon. On la trouve partout en France mais surtout à Lusignan, en Vendée, tout le long de la Loire et de la Gironde. On la retrouve également en Belgique, protectrice de la maison de Gavre. Elle se montre souvent dans les édifices qu'elle a elle-même construits, à Mervent, Vouvant, Saint-Maixent, Talmont, Parthenay.
Mélusine signifie «merveille» ou «brouillard de la mer». Les mythologues y voient la Mater Lucina romaine qui présidant aux naissances ou, plus antérieure, une divinité celte aux formes serpentes. Mélusine est surtout une Fée bâtisseuse, elle œuvre au clair de lune avant le chant du coq. Si un curieux la surprend à l'ouvrage, elle arrête l'achèvement; il manque de cette façon une fenêtre à Merrigoute, la dernière pierre de la flèche de Niort et de l'église de Parthenay.
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Il y eu jadis un roi en Albanie (Écosse), ce roi s'appelait Elinas et fut très puissant. Or un jour chassant par la forêt, il s'approcha d'une fontaine, et aperçut la plus belle dame qu'il eût vu à ce jour et la salua bien humblement.
«Ma chère dame, je désire plus que tout avoir votre bon amour et votre bonne grâce.»
-Donc si vous me voulez prendre pour épouse jurez que vous ne chercherez jamais à me voir au temps de mes couches.» Ainsi parla la Fée Persine. Ils se marièrent, furent heureux et eurent 3 filles. La première née eut pour nom Mélusine, la seconde Mélior, la troisième Palestine. Mais Mataquas, fils du premier lit d'Elinas, qui était fort jaloux, força son père à se parjurer en le poussant dans la chambre où Persine baignait ses trois petites: «Faux roi , tu as manqué à ta parole, cria la mère avec horreur, il t'en mésadviendra, tu m'as à jamais perdue!»
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Quand Persine su fur séparée d'Elinas, elle se réfugia avec ses trois filles en Avalon. Elle les y éleva jusqu'à la quinzième année, les menant tous les matins sur une haute montagne nommée Elénos - la Montagne fleurie, d'où elle pouvait apercevoir la lointaine Albanie.
«Filles, voyez là-bas où vous êtes nées et où vous auriez eu votre sort sans la fausseté de votre père qui vous a réduites à une grande misère sans fin.» Et chaque fois elle répétait le récit de son malheur, si bien qu'un jour Mélusine déclara à ses sœurs: « Je suis d'avis, s'il vous semble bon, d'enfermer le parjure en la merveilleuse montagne de Northumberland, appelée Brumblerio, d'où il ne sortira plus jamais.» Ce qu'elles firent. Leur mère s'en montre très courroucée: «Toi Mélusine, qui es l'aînée, tu sera la première punie. Désormais tu seras tous les samedis Serpente au-dessous du nombril. Si toute fois tu trouves un hommes qui te veuille épouser-à la condition de ne jamais te voir le samedi_, tu vivras le cours naturel d'une vie de femme et tu mourras naturellement. De toutes façons de toi sortira une noble et très grande lignée qui accomplira de belles et hautes prouesses. Mais si jamais tu te sépares de ton mari, sache que tu retourneras au tourment d'auparavant sans fin». Sur ce, elle punit aussi Mélior et Palestine et toutes 4 se séparèrent à jamais. 
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Mélusine s'en alla errer parmi les grandes forêts et les bocages en quête de destin. Elle y rencontra le beau Raymondin. Bientôt tous deux se trouvent, se regardent et se plaisent, et enfin s'épousent en grande noblesse.
De ses amour Mélusine enfanta 8 fils, tous beau et bien bâtis. Excepté quelques détails, celui-là avait de trop grandes oreilles, celui-ci un oeil plus haut que l'autre, un troisième n'avait qu'un seul oeil, un autre en avait trois... Mais tous devienrent puissant. Mélusine avait bel et bien fondé la noble lignée predite par Persine. Le reste était à s'accomplir.
Pendant que Raymondin est à parcourir la Bretagne, Mélusine se fait bâtisseuse. Elle entreprend maintes constructions. Elle édifie la château et la ville de Parthenay sans ménager la pierre, elle fonde à La Rochelle les tours de garde de la mer et nombre d'églises, chapelles et abbayes, si bien qu'à son retour Raymondin s'émerveille de ne plus reconnaître Lusignan. Ensemble ils se font fête mais leur bonheur ne va plus durer bien longtemps.
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Comme il le lui avait promis, Raymondin jamais ne s'était mis en peine de la voir le samedi. Mais son frère, le comte de Forez, le jalousait tant qu'il lui médit alors: «Frère, votre femme tous les samedis est de fornication avec un autre». A ces mots Raymondin entre en fureur, l'épée à la main il se rend devant la porte interdite. Contre l'huis il applique la pointe fine et l'y tourne tant qu'il fait un trou par où il peut apercevoir toute la chambre. Il voit dans une cuve de 15 pieds de tour Mélusine qui était au-dessus du nombril en figure de femme en train de se peigner le cheveux et au-dessous du nombril en forme de queue de serpent.
«Je viens mon amours, gémit Raymondin, de vous trahir à cause de la fourbe exhortation de mon frère».
Hélas, la malédiction de Persine va les séparer pour toujours. Et d'un bond Mélusine saute sur l'une des fenêtre de la chambre, aussi légèrement que si elle avait eu des ailes, en poussant une très douloureuse plainte et se jette dans les airs. On ne sut jamais ce qu'elle était devenue...



Morgane la fée

A la fois femme et savante, Fée sylvestre, Nymphe des vagues, sorcière et Enchanteresse. C'est l'une des figure les plus riches, les plus attachantes de la Vendoise des Fées. Certes elle est dérangeante puisqu'elle va oser crier sur tous les toits l'infidélité des immaculés et irréprochables quêteurs du Graal.
Il était un fois un roi qui régnait sur la Cornouailles. Il s'appelait Gorloës, seigneur de Tintagel. De sa femme Ygerne il avait eu deux filles, celle qui allait devenir la femme de Loth d'Orcanie, et Morgane qui allait devenir Fée.
A la mort de son père, Morgane fut élevée par son beau-père, Ute Pendragon. Elle fut mise très tôt aux lettres et devint très habile en toutes sciences, dans les 7 arts et surtout en ceux de la médecine, d'astronomie, de magie et d'ingromancie enseignés par Merlin. Pour cette maîtrise en clergie l'appela-t-on Morgane la Fée.

C'est sans doute à cette époque qu'elle visita pour la 1er fois l'île Fortunée d'Avallon, où elle devint rapidement reine écoutée, aimée, entourée de ses 9 sœurs. Personne à Tintagel ne devinait ses voyages, sauf peut-être Merlin, quand il la voyait revenir de ses longs envols, les cheveux mouillés et parfumés.
Le temps passait, elle grandissait. Uter était mort maintenant et Morgane avait suivi son demi-frère Arthur et sa jeune épouse Guenièvre en la forteresse de Camelot. Tous les preux chevaliers, dont Lancelot, n'en avaient que pour Guenièvre. Morgane se contentait des pâles chevaliers blessés, qu'elle recueillait sur les grèves perdues et soignait par ses sciences.
Enfin un jour, le cousin de Guenièvre vint à passer au château. Ils parlèrent tant ensemble qu'il la prit d'amour. Pauvre Morgane, ce rare bonheur terrestre lui sera vite enlevé. Souvent en secret les amants se rejoignaient, mais un matin la reine Guenièvre les surprend, entre en grande fureur et les sépare. Trahie, déchirée, morgane va dès lors la détester toute sa vie durant.
Elle se retire «embaumer» son chagrin loin du monde et des hommes, quand un autre coup au cœur transforme pour toujours la Fée sage et rêveuse en Morgane vengeresse.
Elle avait depuis peu mis son amour dans un chevalier dont elle se croyait uniquement aimée, mais il la trompait en lui préférant une autre demoiselle. Un jour ils avaient convenu de se rencontrer au secret d'un val, le plus riant, le plus beau qu'on puisse imaginer. Morgane avertie courut à eux et les surprit. Peu s'en fallut qu'elle n'en meurt de douleur, mais revenant à elle, elle jeta sur le val un enchantement dont la vertue était de retenir pour toujours tout chevalier qui aurait fait à son amie la moindre infidélité d'action ou de pensée.
Le chevalier fut la 1er victime du charme; quand il voulut s'éloigner il se sentit arrêté par une force invisible. Et la demoiselle se trouva enfermée dans la glace jusqu'à la ceinture et de la ceinture à l'extrémité des cheveux dans un feu ardent.

Morgane fit construire des maisons, une chapelle afin d'y accueillir les amants parjures qui y viendraient s'emprisonner, et de sa tour ferrée gouverna les lieux.
Au bout de 18 années il s'en trouva 200 à être ainsi retenus, jusqu'à ce que Lancelot, le cœur fidèle à Guenièvre, vienne les délivrer...
Une fois encore Morgane est vaincue, sur Arthur et son royaume elle jette alors sa malédiction, mais point n'est besoin de sortilège pour que les hommes se détruisent; Mordred et les tristes intrigues suffiront au déclin de Camelot et des rêves chevaleresques.



La fée Viviane

Belle comme toutes les Fées, avec ce quelque chose de plus troublant qui enchanta Merlin. Il y a la Nymphe, l'Enchanteresse, la Fée, celle de l'imaginerie arthurienne et celle des contes de fées.
On a maintes fois accouplé Viviane et Morgane. Toujours l'une porta le fardeau de la prison de Merlin et l'autre celui du Val sans retour.

C'était un jour plein d'eau et de feuillage, qui s'attardait aux fontaines. Tous les chemins était creux avec des haleines de puits. Merlin marchait derrière Viviane. Elle avançait vivement de peur qu'il ne s'attarde, que le souvenir d'Arthur ne le rappelle vers l'orée. Une fois enfouis au cœur des frondaisons, les racines sauraient le retenir. Mais si proche des lisières un signe de l'extérieur traversant le couvert pouvait encore l'arracher à l'emprise végétale. Elle lui avait demandé de mettre sa robe des forêts, celle qui commandait aux arbres et aux roches moussues.
Elle avait mis toutes les ruses de son côté et il le savait. Il laissait les herbes effacer leur passée. Un martin-pêcheur faufila le ciel et la rivière tout le long de la berge voisine. Merlin soupira sur tous ceux qu'il quittait dans leur aube de gloire, ces preux chevauchant à travers les vergers enrubannés de printemps, vers les tours de Camelot parées pour les noces d'Arthur et de Guenièvre.
Il ne les abandonnes pas, il quitte un monde où les clairvoyances ne sont plus entendues. Il a déjà connu tant de rois dont les puissantes voix à jamais se sont tues alors qu'à la branche d'aupépin chante toujours le roitelet des bois.

Il s'éloigne vers de sauvage ermitages, cherchant au fond des cavernes les accès refermés du Monde Fortuné. Elle, peut-être, le ramènerait là-ba. Il l'avait rencontrée à la cime de mai, couchée sur la margelle de Barenton, la fontaine qui rit quand on y jette une épingle et ouvre les rivières des cieux si on arrose sa pierre. Elle était Nymphe galloise et s'appelait Viviane. Toujours il l'avait retrouvée quand il s'abandonnait à ses folles pensées.
Viviane entendait tout cela pendant qu'il marchaient côte à côte, comme ils avaient si longuement voyagé ensemble. Cette fois, se disait-elle, je ne le laisserai plus repartir. Et elle portait un regard ému sur sa taille qui s'était courbée, sur son visage raviné et le flot de sa barbe blanchie. Elle se souvenait de leur première étreinte, elle, fille de la lune et de l'eau, Fée de fontaine, effarouchée d'abord par ce dieu forestier, du chêne et de la pierre. Il avait ôté sa ramure de cerf et la pelisse de loup pour s'accoler à elle.
Elle lui épargnerait la trahison de Guenièvre et de Lancelot. Ce Lancelot qu'elle avait jadis enlevé à sa mère Elaine, selon la coutume des Fées, et élevé pour être chevalier-Fé. Elle lui cacherait le déclin de Morgane et l'agonie d'Arthur.
Viviane le tiendrait loin d'un monde que les Fées une à une avaient fui. Elle l'enfermerait dans ce bosquet d'aubépine où étaient nées leurs amours et qu'elle déroberait à la vue de tous, derrière les remparts d'illusions, que Merlin lui avait appris à ériger lorsqu'ils s'échangeaient les formules de leurs sciences secrètes.
Mais sans doute savait-il déjà tout du piège que Viviane était en train de tresser autour d'eux. Hier il avait averti Arthur de son départ sans retour. Qu'aurait-il pu changer au destin du royaume pourrissant, sur quoi ses enchantements n'avaient plus de prise.
Souriant dans sa barbe végétale, Merlin regarde Viviane tracer de gracieux gestes en récitant les paroles d'oubli...


Les Enchanteresses
On les représente toujours merveilleusement belles. Elle n'hésite pas à employer toutes sortes de magies -la «rouge» celle d' l'amour  de préfèrence_ pour arriver à leurs fins. Elle se changent parfois en d'hideuses sorcières et se plaisent à resurgir plus plaisantes encore l'instant d'après. Les Enchanteresses -quoiqu'elles y prétendent- ne sont pas des Fées, mais des mortelles qui, par études, par initiation, ont acquis certains arts des Fées et puissances d'enchantements. Peu d'entre elles peuvent s'enorgueillir d'une lointaine parenté avec le royaume de Féerie. Ou bien comme Viviane, elles ont obtenu d'un mage la science d'enchantement. On dit qu'elles ne sont pas toujours bonne, jalouses, capricieuses et que leur part mortelle les rend fort dangereuses.
Grâce à leurs pouvoirs, elles agissent pareillement aux fées et Parques sur le destin des hommes. Quelques fois par amour, par profit ou perfidie.


Le chevalier entra par aventure au-dedans de la forêt. De longue errances le menèrent à la clairière du bois. C'était un feuillage de nœud de plusieurs chemins. Le feuillage après s'être serré au point que les ramures s'enlaçaient à lui, s'éclaircit, et le preux entra au-dedans d'un cercle de lande verdoyante. Là il vit la vieille dame hideuse. Si laide, groin de porc et crocs au-dehors. Tachelée et naine, bosselée des membres, un œil crevé, l'autre chassieux qui le regardait derrière des cheveux en paillasse tombant jusqu'à terre.
Elle prit un air mielleux pour l'appeler et à sa voix qui semblait un chant d'oiseau il se sentit faillir. Elle lui dit: «Beau sire, me voulez-vous épouser?» En d'autres lieux, hors de là, sans doute en aurait-il été autrement. Il aurait ri, ou se serait fâché et aurait poursuivi sa route plus loin, la délaissant.Mais il ne bougea pas. Il lui tendit même la main pour l'aider à monter en selle.

Cette fois il n'eut plus à lutter pour se frayer un passage au milieu des taillis, car ceux-ci s'écartaient avant qu'il n'en franchisse les murs et derrière eux se refermaient. Bientôt un château se montra à la fin d'une allée magnifiquement bordée de vergers.
De belles dames parées les aidèrent à descendre et à traverser maints jardins jusqu'à une salle immense où se dressait un autel apprêté pour la cérémonie. Il y eut banquet et bal et moult autres festivités et, à minuit, les époux furent conviés à se rejoindre dans la chambre nuptiale.
Comme le mari hésitait, elle dit de sa voix douce: «Ne voulez-vous pas vous coucher beau sire ?» Et ouvrant les yeux comme si il s'agissait de la première fois, il découvrit la plus belle femme qu'il ait jamais vu. «Je suis bien votre épouse, doux sire, dit-elle, en m'épousant vous m'avez à moitié délivrée de mon sort. Cependant au matin je devrais reprendre ma triste apparence, et ce la moitié de chaque jours, à moin que vous ne puissiez répondre à une question.»

«Préférez-vous me voir belle le jour et hideuse la nuit, ou préférez-vous me voir la nuit aussi belle qu'à cette heure et me laisser dans la journée recouvrer cette monstrueuse figure dans laquelle vous me vîtes ?»
Après un moment de réflexion le chevalier lui dit: «Je suis incapable de répondre à votre question. C'est à vous de choisir ce que vous préférez.»
«Voilà la bonne réponse à ma question, s'écria-t-elle. Car vous m<'avez offert ce que toutes les femmes désirent: la liberté de choisir sa propre vie. Désormais le sort est à jamais rompu. Jamais plus vous ne verrez la dame hideuse. A vous je serais pour toujours.
Et il en fut ainsi.




Les Fées Lumineuses

On peut difficilement la décrire tant l'éblouissement est grand. Belle comme le jour, le soleil, la lune et les étoiles. Belle comme l'aurore boréale et l'arc-en-ciel, la neige au couchant et la mer enflammée. Les Incantadas (Fées Lumineuses) descendaient de leur colline pour faire leur lessive à la rivière avec des battoirs d'or. Les plus grandes félicités étaient assurées à qui parvenait à leur dérober un linge, mais ce n'était pas chose aisée car souvent le bras du voleur se brisait comme du verre.
Quand le bien et le mal était en guerre, certains Esprits ne voulurent prendre parti ni pour l'un ni pour l'autre. Après sa victoire Dieu garda avec lui les bons anges dans le ciel, précipitant les démons en enfer, et pour punir les Esprits qui avaient gardé la neutralité, il les exila sur terre où ils doivent se purifier par de fréquentes ablutions. Ces Fées moitié ange moitié démons sont des Incantadès. Ces génies font le bien jamais le mal.

Lorsque meurt le jour, la nuit s'illumine. Les étoiles, les lucioles, les vers luisants sont les fleurs de mai de la haie endormie. Le chemin perdu dans les ténèbres a besoin de phosphorescence pour se guider dans le noir à travers bois et landes.
C'est l'heure de hantises et des Fées de la nuit qui, aux orbes d'argent des fontaines, accourent s'habiller.  De toutes ces manifestations des «Fées Lumineuses», celle de l'Encantada est selon l'avis des «rêveurs de lumière» la «plus bouleversante depuis les plus lointains jadis...»
Autrefois , en Espagne, les enfants quittaient le village à la brume du soir et gravissaient un sentier forestier jusqu'aux pierres sacrées, admirer l'apparition de la vieille Encantada. Ils s'asseyaient en cercle devant l'entrée de la grotte et attendaient qu'elle paraisse.

D'abord on voyait le fond obscur de la cave tapissé de lierre et de liserons se colorer d'une «teinte de rose et d'aurore... de la fine clarté que prend le ciel aux prémices de l'aube», et une vois douce chantant des paroles mystérieuses parvenant de très loin s'approchait à mesure que s'intensifiaient les rayonnements. Toutes les variations de l'arc-en-ciel jouaient sur les parois tantôt rouges ou vertes, bleues, indigo, violacées, puis une lumière plus blanche que blanche absorbait toutes les couleurs et rayonnait sur la caverne ainsi qu'au-delà de ses environs. Les arbres, l'herbes, les branches sombres des sapins se décoloraient en étincelant comme neige au soleil... Tout devenait transparent, même la roche, même les vêtements et les corps de ceux qui attendaient. Tous les regards cherchaient dans cette lumière l'endroit précis d'où allait naître l'Encantada, car c'est du cœur de cet éclat qu'allaient s'épanouir les formes de la Fée. Chacun retenait sa respiration et, dès que son visage se dessinait au milieu des étoiles, chaque poitrine laissait échapper un souffle de ravissement.
Le spectacle ne durait pas longtemps et ne changeait jamais. L'Encantade regardait le parterre sans le voir souriait aux anges, s'asseyait et avec des gestes lents coiffait silencieusement sa longue chevelure de nébuleuse. Personne n'osait perler ni chuchoter. Engourdis par le charme des éblouissances, les yeux écarquillés, les enfants restaient là jusqu'à ce qu'au dernier coup de peigne un premier rayon s'éteigne. Elle ramassait les jonchures de ses mèches autour d'elle; les regroupait en écheveaux pendant qu'imperceptiblement pâlissaient ses contours. Enfin une fois son peigne enfoui dans les replis de sa robe, elle se levait, souriait à nouveaux aux anges et, soufflant sa propre image, disparaissait d'un coup.
Quand encore tout frissonnants d'émotion, les enfants redescendaient dans le noir, il en manquait toujours un.




Dames Bleues, Vierge de glace et Fées des montagnes
Resplendissantes de beauté. Corps de glace, chevelure givrée. Elles ne supportent pas qu'un humain leur touche les cheveux et sont capable de les abandonner aux caprices des Fées de l'écho qui ne manqueront pas de les égarer, ou à ceux des Fées du vertige toujours prêtes à attirer l'intrus dans l'abîme.
Elles plantent des fleurs sur les pentes, rentrent les chamois le soir dans de vastes cavernes abritent les chalets des avalanches déclenchées par les colères printanières des mugissant Wilde Männer et autres Trolls des alpes, font croître l'herbe et parfument le lait des troupeaux, enseignent aux jeunes bergères l'art des simples et les dons de l'amour.

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Il ne faut pas confondre les «Madame la Fée Bleue» des beaux contes qui exaucent les vœux sincères... avec les Dames Bleues, les Vierges Bienheureuses ou Vierge Sauvages qui règnent sur les montagnes.
Elles apparaissent à l'entrée des cavernes rocheuses. D'une vois claire et retentissante, elle chantent des lieder qui résonnent bien loin dans les vallées. Le berger là-haut sur les pentes herbeuses, entend ce chant, il sait que cela signifie: prend garde à toi! Elles le protège, le suive pas à pas, l'empêchent de se perdre, quand les nuées sont basses de tomber, au fond d'invisible dangers où le mène sa quête, aux confins des territoires terrestres là où l'âme se substitue au savoir.

Épouses fidèles des farouches Waldzegen, Nörggen et Lörggenn, les Vierges Bleues s'attachent aux hommes des alpages comme à des êtres fragiles, des enfants perdus au milieu d'une nature dont ils ignorent la «pensée». Lorsque l'un d'eux tombe, elles le reçoivent dans leurs voiles tendus au-dessus du vide.
La brunette Dive est leur sœur du versant italien, La Fhrön celle du versant suisse; les Dalien aux pieds de chèvre gambadent du côté de l'Autriche.

Les Vierge des Glaces, Reine des Neiges est aussi toute de bleue vêtue. Andersen la décrit superbe entre toutes, les cheveux blancs comme neige, solitaire au milieu des glaces éternelles, cherchant à entraîner les braves visiteurs dans son empire lumineux mais si froid que nul homme ne peut tenir. Afin de les garder près d'elle, la belle leur plante au cœur un éclat de cristal ouvrant les portes de l'oubli et des ravissements infinis. Hélas toujours l'éclat de gel fond, l'endormi se réveille et s'enfuit.
A la fois aérienne et aquatique, elle prend alors toutes les formes pour le poursuivre: en aigle le survol, en saumon de cascade en cascade s'élance, en hermine de branche en branche le rejoint, en souffle de vent le jette dans le vide. Puis la demoiselle s'agenouille près de lui, dépose un froid baiser de mort qui le transforme en gisant de glace.

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Grün évoque avec ravissement les Demoiselles Bleutées, Filles des rayons du soleil, folâtrant au soleil couchant de Lucerne; quand elles chantent en chœur, on croirait entendre le son lointain des cloches d'église. Le soir elles se regroupent en cercle au sommet des montagnes. Elles étendent leurs ailes d'or et de roses. Alors le faîte des glaciers s'illumine de teintes inexprimables et les hommes disent que «les Alpes sont en feu». La nuit, ces aimables Elfines dorment au sein de la neige, attendent l'aurore. Elles partagent leur affection entre les fleurs, les papillons et les bergers.








La légende de Ste Suzanne

   
                      Durant des siècles, les hommes avaient habité cette grotte située dans un petit village proche de Montbéliard dans le Doubs.
               Or l’An Mil approchait avec ses croyances de fin du monde, le moyen age se couvrait de nuages sombres... Les chrétiens décidèrent de se réunir dans la grotte qui serait leur tombeau et emportèrent avec eux la statue de leur sainte. Ils érigèrent un mur de protection à l’entrée et attendirent des jours jusqu’à ce que la faim les tenaille.  

               Or dans la foule se trouvait un forgeron nommé l’Oeuvrart pour son habileté à façonner épées, lances et outils divers. Les yeux fixés sur la sainte, il voyait un miracle se produire : de l’eau ruisselait de la statue en minces filets. Peu à peu ils grossirent : une source était née.  

«  Rentrons dans nos foyers et reprenons nos outils : c’est la volonté divine. »  

               On laissa Ste Suzanne sur son autel, on alluma de grands feux dans les chaumières. Depuis ce jour on évita d’entrer dans la grotte.  

               Cependant après un temps assez long, on voulut redescendre la statue dans l’église, on la chercha en vain. Elle avait disparu sous une énorme stalagmite qui se confond aujourd’hui avec le rocher et la source aussi avait disparu !



La Légende de La roche du Prévot... 

              Nous sommes en plein Moyen-Âge, plus précisément au XIVe siècle… Richard de Clémont, homme cruel rêvant de conquêtes, participe avec Henri d’Orbe, fils d’Etienne de Montfaucon, comte de Montbéliard, à la grande croisade contre le sultan Bajazet, sous la conduite du comte de Nevers.
              Richard exigeait des gens de son domaine toujours plus de redevances et amassait des richesses considérables dans les caves de son château.
               Sa femme Blussange avait le cœur généreux et souffrait du comportement de son mari. L’absence de Richard dura trois longues années. Le prévôt Renaud de Saint-maurice et quelques hommes d’armes étaient chargés de veiller sur le château et sur Blussange. Pendant ces trois années défavorables aux récoltes, Blussange se sentit obligée de soulager ses sujets en leur distribuant les réserves accumulées au château.
              Un soir, Richard rentra. Il était méconnaissable tant il avait souffert. Mais très vite, il entreprit la visite de ses réserves. Il s’en prit aussitôt à sa femme dont il connaissait la trop grande générosité. Mais le prévôt Renaud s’accusa pour sauver Blussange. La colère enleva à Richard tout son bon sens. De la terrasse du donjon, il contraignit Blussange à assister au spectacle du supplice du prévôt. La bonne dame s’évanouit.
               Richard perdit la raison. Chaque soir, il chevauchait un cheval noir le long des falaises du domaine et, ce qui devait arriver arriva… 
              La légende dit que le prévôt s’était vengé. On raconte que certains soirs de pleine lune des touristes fatigués et égarés croisent parfois dans la brume montante la silhouette d’un cavalier fantomatique… Mais c’est une légende bien sur !

Une légende médiévale : les pas du Diable


                                         Une légende qui sent le souffre (cela va faire plaisir à quelques fidèles !). De retour de  Rome ou il s’était rendu en pèlerinage aux tombeaux des apôtres, saint Dizier se dirigeait vers l’oratoire consacré à saint Martin  (voir notre précédent article sur l’église de saint Dizier) Il traversait avec ses deux compagnons un profond bois ou le diable rodait depuis longtemps. Celui ci, furieux de voir un saint homme fouler son domaine, surgit d’un buisson ou il s’était tapi, et de ses griffes immondes s’empara de l’évêque. Il le souleva pour le jeter ensuite brutalement sur un grand rocher plat… Mais ce que le Malin (pas si malin que cela !) n’avait pas prévu, c’est que ses sabots fourchus encore chauds des flammes de l’enfer, s’enfoncèrent dans la pierre devenue miraculeusement tendre comme du sable… Aussi miraculeusement il se retrouva prisonnier de la pierre redevenue dure… Le saint homme, après avoir remercié Dieu de sa protection, délivra la terrible  créature. Le Diable couvert de honte, s’enfuit alors… On peut encore voir de nos jours dans un petit bois proche du village de  Villars le Sec, les traces profondes laissées par le démon dans la grande pierre couchée (antique autel celte ou barbare…) et celles plus légères des sandales du saint. Ce lieu de nos jours est facilement accessible. J’ai cependant souvenir, il y a de nombreuses années, d’une visite nocturne avec quelques amis… A cette époque la forêt était encore dense et profonde autour de la clairière… et comme chargée d’énergie... La grande roche crépitait d’une force mystérieuse… Je dois avouer que ce jour là, les courageux aventuriers se sauvèrent, avec une peur… du diable !